mardi 10 février 2015

1942/1944 - Papy fait de la résistance

Papy fait de la résistance de J.M. Poiré (1983)


Maman réhabilite son père que mamie ferait passer pour un collabo. C’est ainsi que “ Pierrot ” se fait confisquer sa voiture à Montélimar, peu de temps avant la fin de la guerre.


Mon mari trafiquait, il allait à droite et à gauche.
Il ouvrait son parapluie d’où venait la pluie. Finalement, même s’il allait et venait, il n’était pas suspect ; il était du côté des boches pour ainsi dire. Ils avaient une camionnette qui était à nous. Enfin il s’est mis du bon côté, du côté des boches

Maman :

Je dirais que mon père son objectif c’était de conserver sa voiture parce qu’il n’était pas salarié et que s’il perdait sa voiture, il n’avait plus un centime. Quatre ans de guerre, c’est un peu long pour nourrir une femme et une gamine, alors, il ne faut pas exagérer !




Peugeot 302


Pour la garder il fallait qu’il ait des “ Ausweiss ” de la part des allemands, des autorisations de circuler. Comment les obtenir ? En faisant des achats au marché noir et en les revendant au type qui lui fournissait.
Il fallait aussi qu’il soit bien avec la résistance pour ne pas passer pour un collaborateur. Il servait de taxi aux résistants quand ils allaient faire sauter des ponts, des voies ferrées, des machins comme ça.

Tout ça c’était pour garder sa voiture. La guerre, mon père disait depuis le début que c’était une énorme connerie et que cela ne le concernait pas.
Il était encore mobilisable, mais comme il avait eu une pneumonie et des tas de trucs, il a été réformé pour ne pas partir à la guerre. Ce n’était pas un héros qui voulait partir la fleur au fusil. 


Guernica Picasso 1937



Donc, je crois que mon père ce n’était pas un traître, un collaborateur, il n’a jamais vendu un type aux allemands, il ne faut pas croire.
Il avait d’ailleurs un nom de résistant : Pierrot. 




BO de L'armée des ombres de JP Melville (1969)



Par contre, il ne parlait de rien à ma mère, il n’a jamais dit à ma mère qu’il transportait des résistants. Quand il partait le soir, elle ne savait pas où il était, évidemment les attentats, ça se préparait pas en pleine journée !


J’ai entendu mon père dire “nom d’un chien, le nombre de fois où j’ai fait le couillon à attendre dans un chemin de terre avec ma bagnole que cette bande de fous qui allait poser des bombes reviennent, en espérant qu’on aurait le temps de se tirer avant que les allemands rappliquent, et tout ça on se demande bien pourquoi.” Mon père trouvait bien souvent que c’était inutile et que ça coûtait plus cher que ça rapportait.


Donc la résistance de mon père s’est terminée peu avant la libération, à Montélimar quand un allemand a trouvé suspect que ce type continue à se balader avec sa bagnole. Il a été arrêté, on lui enlevé sa bagnole et on l’a fait traverser la ville pour aller à la Gestapo les mains en l’air avec une mitraillette au cul. Et là il s’est dit je suis cuit. Il est resté des heures à poireauter. Ma mère ne le voyant pas revenir et sachant qu’il était à Montélimar a téléphoné à la Gestapo. Là dessus est arrivé un officier allemand auquel il avait donné du beurre en échange de ses autorisations de circuler et qui s’est porté garant de lui en disant “ Perremorte pa terrorist ”. On l’a libéré, il est parti mais sans réclamer sa bagnole.


La Kommandantur à Montélimar

Mamie :

Inquiète de ne pas avoir de nouvelles et sachant qu’il était à Montélimar, j’ai téléphoné à la Gestapo. J’étais culottée hein ? J’ai dit : “ je voudrais parler à M. Peyremorte ” “ Ah Peyremorte ! Il est là ”. On me l’a passé “ Qu’est-ce que tu fais Henri, que j’ai pas de tes nouvelles ? Enfin, t’es pas mort ?” Alors il m’a répondu : “ ouh, j’en vaux guère mieux ”.

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