La République et l’Eglise. Images d’une querelle, Michel Dixmier, Jacqueline Laouette, Didier Pasamonik, Editions de La Martinière 2005 |
Papa toujours
J’ai fait ma primaire chez la vieille sœur au château, chez la sœur Sainte Hubert. Elle nous faisait la classe dans la pièce où on a célébré les mariages de Vincent et de Bénédicte. En hiver, on se chauffait au poêle à bois, c’est mon ami Marcel Roudil, qui a été tué en Algérie, qui était le plus souvent chargé de l’allumer. Il n’était pas rare que la sœur nous abandonne pour aller faire sa cuisine.
Un
grillage séparait l’école des garçons de celle des filles. J’y
ai eu le premier coup de foudre de ma vie : Annie Durand. Je lui
glissais des mots. Elle travaillait bien à l’école et il lui
arrivait de m’aider à faire mes devoirs.
C’était
la guerre avec l’école publique. La sœur nous interdisait de
parler aux enfants qui y étaient. C’est le père Jouve de Moredon,
avec qui mon père était d’ailleurs bien copain, qui était
l’instituteur. Ceci dit, il y avait une division terrible dans le
village, la guerre scolaire continuait, c’était les bons chrétiens
contre les communistes. Tous les enfants Pinède y étaient mais
aussi les Robert de Prades, des gens d’une pauvreté incroyable,
les gamins marchaient pieds nus même dans les pelloux.
Le
curé ne parlait pas aux Pinède, le premier à le faire fut le père
Baconet dans les années soixante-dix – c’est lui qui a fait
venir un chantier de jeunes pour faire tomber le clocher -. C’était
la grande affaire, les Pinède le faisait picoler pour le
ridiculiser. Le père Rancher y jurait toute la journée « nom
de Dieu de nom de Dieu ». J’aimais bien y aller parce que là
haut on ne parlait que de sexe, ils étaient chauds, quand on est
gamin, ça vous intéresse d’autant que la Paulette était un peu
allumeuse avec les jeunes.
dessin de presse anticommuniste 1920 |
dessin de presse antifasciste 1934 |
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