Marie et Jacques Jouve devant la maison du Travers à Joannas |
Sur
la fin de la guerre, raconte papa, comme partout en France, le nombre de maquisards
s’est considérablement accru, au point que le château – de Logères - ne suffisait plus pour les héberger. Chez les Jouve du
Travers, le maquis occupait la maison, ils couchaient « au
café ». La boulangerie l’était aussi, le maquis y faisait
son pain et mon grand-père le faisait après. Sur le jeu de boules
étaient parqués plein de cars et de camions. Si bien que j’étais
toujours avec des maquisards qui étaient très gentils avec moi.
Tout
le long de la route, il y avait des maquisards embusqués et équipés
de mitrailleuses : au Chabrolin, au Champ Bonnet… Au Suchet,
il y en avait une bien placée sur des rochers qui dominent la route
qui arrive de Largentière. J’y suis allé m’y amuser pour
récupérer des balles.
Un
jour, il est passé une traction avec un officier allemand, si jamais
quelqu’un avait tiré, on y passait tous. Ce jour là on a eu très
peur.
Une
autre fois aussi, on a vu passer au-dessus de nous un petit avion
allemand. Ma mère a fermé la maison et on s’est sauvé avec deux
ou trois sacs dans la montagne. On entendait les coups de feux à
Brison des maquis qui se bagarraient contre les allemands. On avait
d’ailleurs là-bas un cousin, Guybourdanche qui a toujours gardé
les balles qui l’avaient blessé et qu’on avait dû lui retirer.
Des allemands ont brûlé sa ferme et il a été en procès pendant
au moins vingt ans avant d’obtenir une indemnisation.
Uranus de Claude Berri (1990) d'après le roman éponyme de Marcel Aymé
On n’a jamais eu faim malgré les ponctions des maquisards. Ma mère me faisait du « caillé » tous les jours. Bon, on a eu du pain parfois un peu bizarre, jaune, noir... Une anecdote comique : un jour la boulangerie a brûlé et ça s’est mis à sentir le caramel de partout. Joannas s’est mis à jaser : le père Jouve stockait en secret du sucre.
Pour
moi, la guerre, ça a été un jeu, j’étais très libre, je n’ai
jamais vu tomber une bombe.
Par
contre, à la libération, le maquis a fusillé pas mal d’allemands
et de français, Paulette (Pinède) pourrait te raconter, elle avait
18 ans alors et elle était toujours fourrée au château où les
maquisards faisaient la bamboula entre deux exécutions. J’y allais
aussi. Ce qui m’avait frappé pendant une fête, c’est que j’ai
vu sortir de l’ouverture en rosace de la chapelle, une tête :
c’était un prisonnier, ils enfermaient les prisonniers dans la
chapelle.
Après
la guerre, durant quelques années, des prisonniers allemands sont
venus travailler dans les fermes.
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